“Touche pas au grisbi, salope !”

Paris, jeudi 15 octobre 2015. Georgette Sand a appris avec stupéfaction cette nuit le rejet de l’amendement déposé par la députée de la Vienne (PS) Catherine Coutelle, au cours des discussions à l’Assemblée nationale pour l’examen du projet de loi de finances 2016. Cet amendement aurait permis l’abaissement du taux de TVA sur les protections périodiques - tampons, serviettes, coupes menstruelles - de 20% à 5,5%.

C’est autour d’1h du matin que l’amendement a été rejeté, après 15 minutes de discussion. A une voix près. Ce résultat paraissait cependant inévitable, au vu des circonstances : un vote tenu à pareille heure, dans une assemblée aux bancs bien vides, où les femmes sont de toute façon sous-représentées. Georgette Sand regrette particulièrement la réaction du secrétaire d’Etat au Budget Christian Eckert pour qui les protections hygiéniques sont aux femmes ce que la mousse à raser est aux hommes. Il oublie que quand un homme se rase la barbe, une femme se rase bien souvent les aisselles et les jambes, et que l’opprobre ne saurait toucher un menton mal rasé, quand une absence de protection périodique ne saurait passer inaperçue.

Georgette Sand est d’autant plus déçue qu’il y avait bon espoir que l’amendement soit retenu. Soutenu par la Commission des finances, il a pâti de l’alignement du groupe socialiste, majoritaire, sur la position du gouvernement, à savoir : on ne touche pas à la TVA. Quand on sait que la TVA constitue aujourd’hui 70% des recettes de l’Etat, on comprend la sensibilité du sujet, que M. Eckert qualifie de « passionné ». Ah, la passion féminine… Georgette Sand a envie de reprendre à son compte les Tontons flingueurs : « Touche pas au grisbi, salope ! »

Pas simple, le sujet de la TVA ? Marisol Touraine a bien obtenu en 2014 l’abaissement du taux de TVA sur les capotes à 5,5 %. La reconnaissance de la première nécessité rencontre d’incroyables blocages, et les protections périodiques se voient comparées aux rasoirs et au savon. Si M. Eckert ne voit aucun problème à ce que les femmes se baladent dans la rue tâchées de sang à l’entrejambe, qu’il le dise plus clairement. D’autre part, si les taux de TVA sont devenus si opaques et incompréhensibles, c’est qu’ils sont régulièrement soumis aux pressions des lobbys industriels : questionner le taux de TVA sur les protections périodiques, c’est ouvrir la “boîte de Pandore” de la TVA plus élevée pour le dentifrice que pour le coca. Il faut donc du courage politique pour le faire… eh oui, du courage !

C’est un fait : le gouvernement fait de l’égalité femmes-hommes quand ça l’arrange, et quand ça ne bouscule pas de trop ses principes. Comme si ce qui avait été acquis jusqu’à présent suffisait, et qu’il ne faille plus se battre pour la progression de la place des femmes dans la société. Le gouvernement ne va pas sur le terrain de l’économie et de la consommation, alors que ces terrains comportent des habitudes pénalisantes pour les femmes. Il se limite aux sujets traditionnels de l’avortement, de la contraception ou des violences faites aux femmes. Les inégalités économiques sont probablement moins visibles, et donc plus pernicieuses. Georgette Sand tient à rappeler qu’aujourd’hui, les femmes gagnent en moyenne 27% de moins que les hommes à qualification et expérience équivalentes. En 2013, les hommes touchaient en moyenne 1642 € de pension de retraite par mois, et les femmes 993 € (soit 65% de plus pour les hommes, oui, 65 diantre de % en plus). Le sujet des dépenses et de la consommation est donc crucial, puisqu’il a tendance à creuser les inégalités. Le collectif attend d’ailleurs toujours livraison des deux rapports commandés par le secrétariat d’Etat aux droits des femmes et par Bercy sur la taxe rose et le marketing genré…

Georgette Sand voit rouge aujourd’hui mais reste optimiste pour demain. Demandez à n’importe quelle femme, quelle que soit son origine géographique ou sociale, ce qu’elle en pense : cette TVA est aberrante. De nouvelles actions sont dans les tuyaux : une action conjointe avec les pétitions soeurs en Europe - en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Italie - permettra de porter la taxe tampon aux portes de la Commission européenne. M. Moscovici, commissaire européen en charge de l’économie et de la fiscalité, n’a qu’à bien se tenir ! Mais que M.Macron ne s’inquiète pas, Georgette Sand ne l’oubliera pas.

Contacts presse :

Juliette MELBA  : 06 18 65 16 72 - Flora PAJON : 06 10 66 11 34 - Gaëlle COURAUD : 06 33 54 93 90

 

Rappel du contexte :

Georgette Sand lance la pétition #NoTaxOnTampons le vendredi 20 février demandant que la TVA sur les tampons, serviettes et coupes menstruelles passe a minima de 20% à 5,5%, comme pour d’autres produits « de première nécessité » tels que l’eau, les denrées alimentaires ou les préservatifs, voire à 2,1% comme c’est le cas pour les médicaments remboursables par la Sécurité sociale. Car avoir ses règles pour une femme, ce n’est pas optionnel ! La pétition : www.change.org/TamponTax

Pour mieux comprendre l’absurdité de la tampontax, voici une petite vidéo pédagogique ainsi que des reportages diffusés à la télévision au printemps dernier, et .

En France aussi, la dépense en protections périodiques représenterait en moyenne 1500 euros dans une vie pour chaque femme… soit une fortune surtout pour les personnes les plus précaires qui optent souvent pour des solutions alternatives non adaptées et potentiellement irritantes. Une mise à disposition gratuite, comme c’est déjà le cas pour les préservatifs, constituerait une avancée considérable dans la prise en compte des publics féminins les plus démunis. Par ailleurs, la gratuité totale du papier hygiénique dans l’ensemble des sanitaires des lieux publics, aéroports, restaurants, et parfois même les universités, ne devrait-elle pas être étendue aux protections périodiques ?

Le législateur pourrait trouver une excellente occasion de lancer un signal fort en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes, mais aussi, en appliquant une TVA réduite sur tous les produits d’hygiène de première nécessité (dentifrice, papier hygiénique, protections périodiques, gels hydroalcooliques, etc.), démontrer l’importance de la santé publique et des politiques de prévention. Il semble en effet paradoxal de traiter fiscalement à taux égal des produits tels que les sodas ou les plats préparés, dont les effets néfastes sur l’équilibre alimentaire et la santé sont largement prouvés, et les produits d’hygiène de première nécessité.

Les taux de TVA en France et en Europe :

Les pétitions soeurs en Europe et dans le monde :

Grande-Bretagne : change.org/endtampontax

Italie : https://www.change.org/p/le-mestruazioni-non-si-tassano-iva-al-minimo-sugli-assorbenti

Australie : https://www.change.org/p/axe-the-tampontax-bloodyoutrage

Canada : : https://www.change.org/p/no-tax-on-tampons-a-campaign-to-remove-the-gst-charged-on-menstruation-products-sign-the-petition

À propos de Georgette Sand :

Le collectif Georgette Sand décrypte l’actualité de l’égalité dans les médias, propose une alternative aux codes de genre et se mobilise pour éduquer les réfractaires. Georgette Sand souhaite encourager la présence et la prise de parole féminines dans les médias et plus généralement sur le devant de la scène. Car faut-il vraiment s’appeler George pour être prise au sérieux ? www.georgettesand.org

Actions Georgette Sand associées :

*Expression tirée du film de Georges Lautner, Les Tontons flingueurs

Trackbacks/Pingbacks
  1. Dis, #Eckert, t’aurais pas du sang sur les joues ? (à moins que ce ne soit des tampons dans les oreilles ?) | les échos de la gauchosphère - 15 octobre 2015

    […] se trouve que le collectif en question voit rouge. ya de quoi, au vu des motivations de bas étage du refus […]